Madame Bovary …soupirs ! Que de rêves, que d’alanguissements, que de chimères ! Et comme nous avons aimé ce merveilleux roman de Flaubert qui, pourtant, décrivait une vie très ordinaire, pleine d’ennui, une tromperie médiocre et une fin si dramatique.
La notion de « bovarysme », inventée à la fin du XIXe siècle par Jules de Gaultier, a été conçue à partir d’un personnage littéraire pour décrire un phénomène de psychologie normale ou pathologique.
Mais finalement qu’est-ce que le bovarysme, et comment savoir si nous sommes atteints par cette maladie ?
Certains parlent d’un comportement caractérisé par une tendance à fuir dans le rêve l’insatisfaction éprouvée dans la vie. D’autres d’un ennui romanesque engendrant un recours dramatique à se concevoir autre que l’on est. Certains, enfin, d’un trouble mental défini par une tristesse profonde et durable.
En France, le Bovarysme a connu son heure de gloire en psychiatrie dans les années 30. En 1906, Philibert de Lastic, psychiatre, dans une thèse édifiante, parlait d’Emma Bovary comme d’une « dégénérée ». Plus tard on associera hystérie, spleen et paranoïa, certains psychiatres allant jusqu’à rajouter la notion de mythomanie.
Si on relit Flaubert, on s’aperçoit qu’à chaque déception ou contrariété, Madame Bovary a des torpeurs, des palpitations, des étouffements, tremble, pleure et maigrit. Irritable, exaltée, capricieuse et ingérable, elle est sujette à des insomnies et des migraines.
Hystérique donc, en proie à des hallucinations, d’une sensibilité exacerbée, Emma Bovary a connu une fin très triste mais un destin hors du commun puisque non seulement l’œuvre de Flaubert est un monument de littérature mais aussi un sujet sur lequel se sont penchés d’éminents scientifiques jusqu’à nos jours.
Mais la grande nouvelle n’est-elle pas de se dire que les signes cliniques dont souffrait Emma, cette étrange « maladie des nerfs », ressemble fort à ce que nous ressentons aujourd’hui, avec plus ou moins d’intensité, lorsque nous sommes déçus ou malmenés par la vie ?