Les Anciens situaient l’origine de la dépression dans la bile noire (d’où la « mélancolie »). Les Anglo-Saxons, eux, la localisaient dans la rate (« spleen » en anglais). Freud, dans son essai « Deuil et mélancolie », la rattachait à la perte d’un être cher ou, par extension, d’un idéal, engendrant un sentiment de culpabilité.
Plus personne, sauf les Chinois, ne croit à la présence dans notre corps de liquides organiques (les humeurs ) qui seraient responsables des différents tempéraments.
Au Moyen Age pourtant, on distingue quatre humeurs (le sang, la bile jaune, le phlegme et la bile noire ou mélancolie) qui sont associées aux 4 âges de l’homme, aux 4 saisons ou aux 4 éléments :
C’est le déséquilibre, la prédominance de l’une ou de l’autre des humeurs qui explique les dérèglements, parmi lesquels les effets de la mélancolie ont particulièrement retenu l’attention des théologiens et des médecins.
La propension du mélancolique à la tristesse le pousse au repli sur soi, à la recherche de lieux écartés, parfois au suicide. Sa couleur est le noir, sa saison l’automne (ou l’hiver), sa planète, Saturne.
Souvent évoquée entre le XIVe et le XVIe siècle, la mélancolie ouvre les portes du songe et du monde de la fiction.
Suivant une pensée que le Moyen Age attribuait à Aristote l’humeur noire est associée à une activité créatrice : les hommes d’exception sont » manifestement mélancoliques, et certains au point d’être saisis par les maux dont la bile noire est l’origine « .
A l’époque des romantiques, la mélancolie est caractérisée par une attitude instable, avec des passages de l’enthousiasme au désespoir. Cet état d’âme n’a pas de cause précise et sera plus tard baptisé « le mal du siècle ». Les artistes romantiques sont marqués par la fatalité, maudits, et se complaisent dans cette douleur grandissante qui les révèle. Ils sont fascinés par le macabre ou le beau.
La médecine actuelle, pour sa part, s’interroge toujours sur ses causes. Une enquête, menée entre 2005 et 2008 par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé auprès de 6 500 personnes, a montré que 18 % des Français connaissent, à un moment de leur vie, un « épisode dépressif majeur ».
En psychiatrie, le terme mélancolie est utilisé pour désigner, non pas une tristesse vague sans cause définie, mais une psychose qui survient par épisodes et se caractérisant par, comme le précise Griesinger : « l’existence morbide d’une émotion pénible, dépressive, qui domine le sujet». La mélancolie aboutit progressivement à la baisse des capacités cognitives (facultés intellectuelles).
Aujourd’hui, en France, un mélancolique est donc un dépressif et on le traite « vigoureusement » : ainsi les dépenses d’antidépresseurs remboursés par l’assurance-maladie ont atteint 572,5 millions d’euros en 2008.